vendredi 18 novembre 2011

Couleurs...

Brouillard si dense que l’air devient eau. Impression de me noyer dans ces arabesques qui font chavirer mon corps. Plus de respiration pour moi, l’eau me maintient en vie comme elle le ferait avec ses protégés aquatiques.
La brume s’écrase contre cette carapace marine en volutes lents. En vagues de fumée. Des formes s’impriment sur cette armure  comme si une goutte d’encre avait été perdue dans ces milliards de perles brillantes. Dessin de vie. D’envie. Elle semble les laisser passer, comme contrainte. Comme si le contact la brulait et au final c’est sur ma peau que l’encre vient faire lécher ses flammes.
Une goutte sur mon pied qui se répand comme un serpent. Ondulant sur ma chair, sinuant sur cette enveloppe charnelle qui se modifie, refroidissant au fur et à mesure de sa noire avancée. Mes yeux se ferment. Chaleur insupportable qui m’envahit et pourtant j’aimerais qu’elle ne s’arrête jamais. Pour rien au monde.
 L’encre a entièrement noirci mon corps lorsque je rouvre les yeux. Un sourire en pensant que me fondre dans les ombres sera plus facile maintenant. Diamants qui s’échappent de mon regard et glissent le long de mon corps comme si mon âme s’échappait pour mettre sa touche personnelle à une apparence trop sombre. Lianes d’argent qui s’enroulent et posent la seule touche de lumière.
Les yeux sont la fenêtre de l’âme me souffle l’onde marine avant de me relâcher.
Chute lente puis de plus en plus rapide jusqu’à m’en couper la respiration. Mes muscles se tendent inconsciemment dans l’attente de l’impact qui ne vient pas. C’est un nuage d’orage qui me réceptionne dans son étreinte moelleuse. Je me penche pour regarder sous lui  essayant d’oublier le bruit assourdissant. La pluie n’est composée que de particules de couleurs vives et violentes.  Une envie profonde de participer à cette joie. Course légère et saut. Vrille pour se retrouver exposée aux larmes chamarrées. Elles s’écrasent sur ma peau avec violence. Explosant à mon contact en impacts durs. Je me rattrape au dernier instant à un rebord rocheux alors que le sol se rapprochait dangereusement. Mes bras me hissent au sommet et je reconnais le lieu.
Le haut de la tour.
 Le sol est jonché de marques de griffes plus ou moins profondes. Grondement sourd et profond qui me fait vibrer. Son que je n’ai pas entendu depuis longtemps.
Un ami aux écailles de nuit. Je souris en voyant mon reflet dans ses yeux. Des fleurs enluminées s’épanouissent sur mon corps, le long de cette liane d’argent. Un pas en avant vers cet ami qui m’a manqué. Murmures d’un clapotis. Mes pieds sont maculés de son liquide vital. Son sang qui s’écoule de ses ailes déchiquetées et de son corps lacéré. Je ne connais personne capable de faire ça à un dragon. Impuissance alors qu’il se vide de ce liquide si précieux. Sa présence n’était peut-être plus en ce monde mais qui en décide…
Je m’adosse une dernière fois contre lui, profitant de sa chaleur encore présente alors que sa vie s’échappe. Son aile morcelée se referme sur moi dans une sombre étreinte me soustrayant au regard laiteux de la Dame. La nuit sera douce… Autant que possible…

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