L'air entre dans mes poumons avec l'impression que c'est la première fois que je respire vraiment... La chaleur environnante brûlerait presque mes organes mais au lieu de cela elle me réchauffe. Le sol semble doux et pourtant dur à la fois. Mes yeux s’ouvrent lentement pour se refermer tout de suite aveuglés par le soleil. Mais la seconde est suffisante. Je suis dans un désert, allongée dans le sable. Mon corps n’est pas douloureux mais c’est comme si je ne pouvais pas le bouger. Il ne répond pas, je deviens spectatrice. Pic de douleur qui contredit ma précédente affirmation. Je retombe dans l’inconscience. Nouveau réveil, cette fois dans un jardin de béton, toujours cette chaleur mais le sol est plus dur et inconfortable. Je me redresse non sans une grimace face aux courbatures. Je bouge doucement et tente de retrouver ma souplesse. Ombre blanche. Je me retourne. Mes doigts ont disparus pour être remplacés par des griffes argentés. Il n’y a rien. Personne et pourtant c’est comme si j’étais sur un terrain qui ne m’appartiens pas. Mon cœur s’accélère légèrement et je décide de bouger pour ne pas rester en vue du prédateur qui semble roder. Saut en douceur dans une flaque d’ombre. Disparition.
Slalom infini entre les zones d’ombres qui m’accueillent et me protègent. Le corps couvert d’un fin tissu noir qui me fait disparaitre entièrement à la vue de tous. Seuls mes yeux luisent indiquant ma position. Ombre noire cette fois. Plus humaine et pourtant l’impression que c’est la même. Je ne bouge pas, fermant presque complètement les yeux, devenant une ombre parmi les autres. Frémissement dans l’air. Présence. Peau sombre, yeux de nuit, griffes noires, corps marqué de cicatrices et d’arabesques ébènes comme des signes tribaux. Il semble chercher quelqu’un, écoutant le vent mais seul le silence lui répond. Je n’existe pas. Son regard balaye la zone d’ombre où je suis avant de se fixer. Sur moi. Instinct profond qu’il ne me voit pas mais me sent. Je ne le laisserais pas approcher. Mes griffes reprennent leur place en même temps que le bondissement félin qui me porte à sa rencontre. Esquive rapide. Beaucoup plus animal qu’humain. Qui est-il ? Un ami ? Un frère ? Je me méfie de ses griffes trop semblables aux miennes. Je connais les ravages qu’elles peuvent faire, même sans le vouloir. Mon corps en porte les cicatrices et je ne suis pas sûre de vouloir retenter l’expérience. Il n’attaque pas ne semblant pas forcément tout à fait à l’aise avec ses armes, avec lui-même. Il se contente d’esquiver mes assauts avec plus ou moins de facilité mais sans jamais me lâcher des yeux. Comme s’il me transmettait un message.
Alors je m’arrête. Défi. Il fait demi-tour et court. Sautant sur les toits. Il semble chez lui, connaissant par cœur l’endroit où il se trouve. Il ne m’échappera pas, il ne peut pas se présenter à moi et disparaitre par la suite. Mes pas se calquent sur les siens. Accélération. Infime et pourtant notoire. Je le rattrape et le dépasse avant de ralentir. Il s’arrête avant de recommencer en s’assurant que je le suive. Escalade d’un bâtiment. Celui qui semble le plus haut. Le vent nous accueille. Glacial sur nos peaux en sueur. Ses yeux nuit plongent dans les miens, rencontre l’argent et à nous deux nous recréons l’atmosphère nocturne. Sa main s’approche toujours pourvue de ses griffes noires comme s’il ne savait plus comment les enlever. Il hésite à s’approcher et finalement retiens son geste. Mue par un instinct qui me dépasse j’avance mon visage et le dépose contre sa peau brûlante. Fraction de seconde. Frisson. Froid à nouveau.
- Quel est le nom de celui qui me défie pour mieux m’apprivoiser ?
Son regard semble surpris. Comme si plus personne ne lui demandait son nom ni même cherchais à le connaître. Sa voix n’est qu’un souffle quand il me répond.
« Asaen »
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